par @ranx2
– On est un peu en retard, non ?
– Oh, pas plus qu’hier. Il était là à 8h09 et le soir, je l’ai pris à 19h15 alors qu’il devait partir à 13…
– C’est dingue quand même…
– C’est comme vendredi, avec trois minutes de retard, il est parti. Et je ne vous parle pas de jeudi…
Non, pas la peine, ne nous en parle pas car entre nous soit dit en passant, on s’en fout. Et à chaque fois que je prends le TER avec ces dames, je m’interroge : comment font elles pour se raconter cinq fois par semaine la même chose ? Au programme :
– L’horaire du train selon les jours,
– Les vacances qui approchent à grand pas,
– Les congés déjà posés, qu’il faudra bien solder même si ça n’arrange pas tout le monde,
– Le fils ado qui fait sa crise
– Le fils fils qui fait sa croissance
– Le petit dernier qui fait sa colique
Et si vraiment, elles ont épuisé tous les sujets, il reste encore :
– Vous avez vu hier soir à la télé ?
Pas la peine de préciser la chaîne, il n’y en a qu’une, le reste, c’est trop compliqué, faut prendre des cours de télécommande appliqués. La copine souhaite visiblement éviter le sujet, ce doit être trop dur, puisqu’à chaque fois elle répond par un « ça, si j’ai vu » accompagné d’un long soupir que l’on pourrait traduire par un « Tout de même, dans qu’è monde qu’on vit (si c’est pas Dieu possible de voir ça à notre époque à nous) ».
Je sais bien que ces dames sont libres de parler du prix de la cochonaille en gros ou de se donner des tuyaux sur les dernières définitions de mots croisés, elles peuvent tout autant raconter leur dîner de la veille en commençant par la prière du soir jusqu’au dernier petit pet avant d’aller se coucher. Mais tout de même, puisque l’on dérange ceux qui osent parler à voix haute dans leur portable, pourquoi ne dérangerait on pas de la même manière, celles et ceux qui ont des discussions chiantes ?
Il n’y a pas de raison, il faut être équitable. A moins d’inventer un nouveau métier.
Le souffleur de discussion.
Ah, en voilà un beau métier qui aiderait ces deux femmes en détresse à pimenter leur discussion de quelques anecdotes croustillantes et pas piqués des vers, se lançant dans un véritable duel, histoire de rendre plus excitante cette heure de trajet.
– Dites lui qu’hier matin, vous avez retrouvé l’amour de votre enfance, il est devenu chauffeur de bus.
– Racontez votre croustillant samedi soir. Comment Michel, après vous avoir attaché au lit, a perdu la clé des menottes qu’il croyait dans son jeans.
– Balancez l’histoire de la correspondante anglaise à qui vous avez stupidement servi des escargots dont elle a croqué la coquille
– Partagez votre détresse sur votre grand François qui rigole bêtement au dîner avec un regard vide et fatigué.
Ah, ça aurait tout de suite plus de gueule dans le wagon, même si à bien y réfléchir, on ne saurait pas où les mettre
– Ah bah, vous allez voir, à la prochaine station, le monde qui va monter…
– ça sera pas pire que jeudi quand on a du s’entasser…
– Vous auriez du voir mercredi. Comme des sardines qu’on était…
Et allons-y, c’est reparti… Je tends mon oreille ailleurs, histoire de ne pas entendre la suite.
– Ouais, tu m’entends là. Je te disais, y me dit « carrément, t’es bonne ». Allo , Tu m’entends ? Tu m’entends ? T’as entendu ? Allo… T’as entendu ce que je disais ? Non ? Allo? Je te redis alors ? Ouais, y me disais, « c’est clair, tu vois, carrément t’es »… Allo ? Ouais, tu m’entends là ?
– Le truc c’est d’avoir la J-Force.
– Ouais…
– Et la J-Force, c’est simple, faut aller sur Ivalice, tu vois où c’est sur le plan ?
– Ouais ouais …
– Là, tu rencontres la septième divinité. Et t’as intérêt à avoir des bons points de vie parce qu’avec elle, c’est super dur. Tu distribues « Santé » et tu invoques « Ifrit » et bla bla bla (ouais) et bla bla bla (ah ouais ?)…
– Hein, vivement ce soir qu’on se couche.
– Je vous le fais pas dire…
– Non, mais on le pense quand même, n’est ce pas ?
– C’est pas faux. Y a même un fond de vérité.
– Non mais sérieux, tu m’aimes, sérieux…
– Oh l’aut’, les questions pourries dés le matin…
– Non mais vas-y dis moi, sérieux !!!
– De toute façon, depuis que Germaine est en dépression, le service va à veau l’eau
– Oui, je m’en doute. Tout de même, la pauvre…
– Comme vous dîtes, elle n’a vraiment pas mérité ça…
– Et quel est le nom de son remplaçant ?
Bon… Je pense qu’il va falloir rajouter un wagon spécial souffleurs, histoire de redynamiser tout ça.
Voila enfin le digne heritier du « Ministery of silly walks » 🙂
Bien vu, le titre était un petit clin d’oeil justement 🙂
Je voulais en profiter pour preciser que mon perroquet Polly est mort
🙂
Il n’est pas mort, il se repose un peu 🙂