Ah oui, c’est vrai, j’vous ai pas dit. J’ai fait Koh Lanta. Bon, c’est chouette, mais depuis que je suis rentré, je rationne la nourriture un truc de malade. Le coloc il fait la gueule avec ses trois cuillères de riz par jour.
Ca a commencé vers 14 heures. Ils m’ont foutu dans un avion avec mes copains candidats. Moi j’étais enthousiaste, tu vois, j’allais vers eux, je leur causais, je faisais des blagues…
J’avais jamais vraiment vu l’émission en fait. Je ne savais pas pourquoi j’avais été sélectionné, je n’avais pas postulé. J’avais juste reçu ce coup de fil bizarre.
Le programme philosophique que je suis actuellement dit du « Yes Men » faisant que je me dois de dire oui à la vie, à toutes les propositions y compris farfelues que l’on me fait, fit que je dis oui sans hésiter.
Donc dans l’avion, on trouve un noir, une arabe, une vieille, un mec avec un accent belge et une fille à la poitrine… sympathique. Des gens somme toute assez représentatifs de… ceux que l’on voit d’ordinaire sur TF1.
– Et toi t’attends quoi de cette grande aventure ?
– Pas aller au boulot pendant deux mois.
Chacun a son caméramen attitré. Moi, c’est un fondu du Septième Art qui me suit. C’est Marie, mon amoureuse, qui a fait appel à lui, en me certifiant qu’au moins, je serais beau à l’écran. Putain, j’ai pas de bol quoi, les autres, ils ont des barbus cool qui posent leur caméra de temps en temps, moi, quand je dors il tente des plans expérimentaux. Il tire la langue en filmant et lorsque j’essaie de lui adresser la parole, il répond « t’occupes ». Du coup, ben j’sais pas son nom mais moi je l’appelle Jean-Luc Godard.
Quand on arrive enfin au milieu de nulle part, on rejoint Denis Brogniart. Il a l’air cool, il ne quittera pas sa chemise du séjour. Comme par respect pour nos difficiles conditions de vie. Il parle en joignant ses mains, comme si tout ce qu’il disait était important. Je n’écoute pas trop. Si, la fin, lorsqu’il prend des bandanas dans ses mains.
Nous allons vous diviser en deux équipes : les Kawaçaraks qui porteront un bandana jaune, et les Gouldepichuwakos qui seront en rouge.
D’emblée je préviens :
– Moi si je suis pas jaune, je ne joue pas.
L’équipe technique a beau protester, je n’en démords pas. On me nomme alors capitaine. Dans mon équipe je prends la fille arabe, le ch’ti qui fait des blagues, le beau gosse superficiel, le vieux qui sait tout et un mec qui sert à rien, Francesco.
Le vieux, c’est Alain. Il a du regarder toutes les émissions, les enregistrer, faire des projections tous les soirs depuis 10 ans chez lui pour préparer son aventure.
Il est chaud et me fait bien rire.
– Faut trouver l’eau.
– Mec, on est au bord de la mer.
– L’eau potable, couillon.
– L’eau de mer, c’est potable.
– Non.
– Moi je m’en contenterai. C’est Koh Lanta, là, c’est pas un restaurant quatre étoiles !
J’ai eu la diarrhée pendant 3 jours. Je suis ensuite passé à l’eau potable. Bon, ils ne le montrent pas à la télé, mais il n’y a pas de toilettes sur Koh Lanta. On fait par terre. C’est un peu un sujet tabou sur le camp, et moi, comme j’aime bien jouer avec les sujets tabous, ben je fais caca partout. Y compris près du lit de Francesco, qui n’est pas hyper heureux des trouvailles qu’il y fait tous les soirs.
Seulement, avec mon connard de caméraman, tout le monde est au courant. Le feu. Le feu, j’ai essayé de le faire. Genre trois minutes. J’ai cherché un briquet, quoi, j’ai demandé à tout le monde, je me suis montré insistant. Bon, les autres avaient plein de techniques pour faire le feu, à frotter des bouts de bois sur d’autres bouts de bois et à répéter sans cesse « on y est presque » alors que moi quand je passe devant la seule chose que je vois c’est un bout de bois qui tourne sur un autre bout de bois.
Un caméraman a pitié, il arrête de filmer deux minutes et leur allume les bouts de bois. « On l’a on l’a, on a le feu ! Hmmm on va pouvoir se faire du riz. »
Chouette, du riz. Moi j’veux de la viande. Alors bon, je pars à la chasse. Alain me prévient que même dans l’édition 2005 où les candidats étaient costauds, jamais personne n’avait chassé le bœuf. Seulement, ce que je voulais, c’était du bœuf.
Je n’ai pas trouvé de bœuf. Juste des petits fruits rouges pas dégueu mais vraiment amers.
J’ai à nouveau eu la diarrhée 3 jours et à nouveau souillé le camp.
Y a une épreuve où la récompense, c’est un steak. Je me surpasse et fais le cochon pendu pendant 4 jours complets. Les autres ont tous abandonné après seulement deux heures, mais si en le faisant longtemps je peux avoir deux steaks, ça me va. Je mange comme un porc ma récompense et reviens au camp ragaillardi.
Après y a une épreuve que si tu ne la gagnes pas, tu prends pas le totem qui rend invincible et donc tu peux être éliminé si les autres ben ils votent pour toi.
Je répète seulement ce qu’on m’a dit. Un parcours vachement chiant où on doit passer entre des branches, où on doit creuser des trous dans le sable. Bref, des trucs à la con. C’est les vacances, quoi. Je profite que tout le monde se bat avec le sable pour piquer le totem et me barrer en courant. Seul ce connard de Jean-Luc Godard suit, il court vite le saligaud. Je planque le totem au camp, et Denis vient de suite m’engueuler.
– Dzibz, ça n’est pas la règle.
– Ah ouais, fais péter le règlement ?
– Je cite : « les candidats ne sont pas autorisés à voler le totem et partir en courant dans leur camp le planquer dans le sable. »
– Ah ouais. Ben désolé.
– Y a pas de mal.
Au conseil, là, ils m’ont jarté. En premier, quoi. « Ouais, t’es trop inactif », ben j’suis en vacances connasse, « t’es sarcastique », oui mais toi t’es moche, « je pense que tu ne te sens pas à ta place ici », pourtant j’ai marqué mon territoire autour de ton lit.
Jean-Luc Godard, il fait la gueule, il n’aura pas beaucoup bossé.
– Je peux quand même continuer à te suivre, non ?
– Tu parles, Jean-Luc, tu parles ! Mais c’est fabuleux !
– Vous avez été éliminé, les aventuriers ont voté et leur…
– Ouais ouais ta gueule Denis, Jean-Luc, tu parles quoi !
– Je m’appelle Franck en réalité.
– Donc Jean-Luc tu veux continuer à me suivre ?
– J’aimerais, oui.
– Non merci. Bon tu l’éteins mon flambeau là !
– Dzibz, un dernier mot à vos coéquipiers ?
– J’ai fait caca PARTOUT autour de vos lits !