La grande finale.

Avec les autres, moi et surtout la gent féminine je suis exigeant, et c’est sans doute la raison pour laquelle j’ai encore la queue immaculée. Mais après des tentatives ratées et surtout beaucoup de refus, j’ai enfin réussi à décrocher un rendez-vous. Un vrai, avec une femme qui avait tout de la bonne. Et peu importe où je l’avais rencontrée, ça sentait bon le plaisir charnel. Brune, grande, élancée, la petite paire de lunettes en prime, elle correspondait parfaitement à mes critères récemment revus à la baisse. En bref, une allure de secrétaire s****e avec qui il me tardait de revisiter les grands classiques Dorcel.

Les garçons coquins se souviendront de l’endroit où ils cachaient leurs VHS. Les plus pervers se rappelleront de ceux qui ne les ont jamais rendues. Mais concentrons-nous un peu.

Après avoir traversé les bourrasques glaciales qui balayent le haut de la butte Montmartre, on débarque dans cet endroit cosy et approprié pour l’occasion, le Doudingue. Pour ceux qui connaissent pas, je vais vous la faire de manière putassière : c’est ce qu’on appelle un bar à pupuce, où la paille qui traîne dans ton verre sert aussi à aspirer ce qui reste du cerveau de ta conquête. Pour le coup, c’est pas là que je voulais atterrir mais le froid a eu raison de ma divine cavalière, qui méritait bien mieux que ce tripot.

Jusqu’ici tout se passe bien. Elle prend une pinte et moi un Perrier Citron. Sûrement que chacun a voulu impressionner l’autre. Elle veut me prouver qu’elle aime faire la fête tandis que je m’efforce de pas passer pour une sacoche. Une sorte de clin d’œil pour lui dire qu’elle aura pas besoin de me porter sur ses délicates épaules en fin de soirée, pour finalement lui ronfler dans l’oreille. Mais elle, comme moi, semble apprécier l’intention.

L’atmosphère du lieu parait la mettre en confiance, et blottie dans les banquettes moelleuses, sa langue se délie à chaque gorgée. Finalement ce bon vieux tripot me rend service. Mais voilà, le costume de confident devient de plus en plus inconfortable, à tel point que je commence à envisager une reconversion dans la psychanalyse. Et de la mort de son hamster Arnold, dont elle n’avait apparemment pas encore fait le deuil, on en était vite arrivé à la pétasse de meilleure amie qui lui avait volé son mec. J’avais deux certitudes. La première c’est qu’elle trimbalait un bagage émotionnel conséquent. La deuxième, qu’elle jacassait trop.

Le temps d’une rapide introspection et je me dis que c’est pas demain la veille que j’aurai une occasion pareille. Après tout, je peux fermer les yeux sur sa loquacité car comme on dit « tout vient à point à qui sait attendre ». En plus j’adore voir ses lèvres bouger. Donc j’opine, je relance, et l’encourage à approfondir. Le tout d’un air intéressé, aussi attentif que lors de mes années collège, quand le printemps arrivait et que les professeures jouaient déjà la journée de la jupe. T’étais sûr de me trouver au premier rang.

Petit à petit nous prenons notre rythme, les rires envahissent la salle et je prends même plaisir à l’écouter. J’espère que mes efforts paieront dans la soirée. Mais lorsqu’enfin la mayonnaise semble prendre entre nous deux, la voilà qui s’octroie une pause cigarette. Elle coupe tout, comme ça, juste pour assouvir son envie de nicotine dans l’enfer polaire dont elle se plaignait y a 30 minutes. Si elle pense que je vais me languir de son absence éphémère, elle se trompe. La seule chose que je ressens, c’est l’abandon tandis que j’imagine déjà son haleine puant le tabac froid et  ses dents jaunir d’ici 5 ans. L’impatience se fait sentir et j’en profite pour remarquer que des filles bien plus canons hantent les lieux. « Allez, fais pas tout foirer » que je me dis. Après tout, on dit que dans un couple faut savoir faire des sacrifices, des concessions. Si ça consiste à écouter un canon puant le tabac froid me parler avec des gestes lascifs, je suis prêt à en faire.

Son entrée m’arrache à mes pensées et c’est reparti. Le serveur nous coupe et apporte enfin la deuxième tournée avec les cacahuètes en guise de cadeau de fidélité. Ma complice a l’air de me reprocher de ne pas le remercier, mais attends cocotte, c’est pas un cadeau qu’il nous fait le bougre ! Je vois pas pourquoi je devrais remercier ce roquet alors qu’il me sert de l’urine en bonbon. Mais vu la poignée qu’elle prend, elle a pas l’air au courant. A la rigueur j’aurais toléré qu’elle revienne des toilettes sans avoir les mains humides, mais pas ça. Je ne tiens pas à embrasser la moitié des soupeurs de Paris pour ma première expérience sexuelle, qui de toute évidence venait de tomber à l’eau. Aussi belle soit-elle, manger les cacahuètes du bar c’est rédhibitoire. Le pire, c’est qu’avec toute la salive qu’elle a gaspillée jusqu’à présent, cet arsenic salé ne fera qu’accentuer son besoin de se réhydrater. Ça tombe plutôt mal vu que je comptais l’inviter. L’addition qui s’était alourdie pour elle, venait de gonfler pour moi…

Y a 2 heures, je la voyais comme la secrétaire qui me renverserait du café sur le pantalon, scène digne d’un gonzo gros budget. Maintenant, je vois Maria dans l’encablure de la porte, venue pour passer l’aspirateur dans mon bureau. C’est tout comme parce qu’avec son aspirateur Maria, elle m’inflige les mêmes souffrances que maintenant. Elle est chiante et bruyante. Pour un type comme moi, qui met le dépucelage sur un piédestal, faut comprendre que je sois intransigeant. La fille n’en a peut-être pas conscience mais moi je joue une grande finale à chaque rendez-vous, jusqu’au jour où je soulèverai la croupe.

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