Elle m’a dit : je t’invite au KFC

 

« Tu quoi ?

Je t’invite au KFC, mets ton plus joli slip et suis moi. »

 

Je l’ai rencontrée il y a deux semaines, une soirée  en laquelle je n’espérais pas grand-chose. Un plan de dernière minute afin d’attiser les péripéties d’un jeudi soir morose. Le texto très original envoyé à 23h15 :

« Tu fais quoi ? »

« …je ne suis pas d’accord avec France 5 sur l’analyse antisémite qu’il porte à Céline . »

« Ok, je te sors, rendez-vous dans 15 minutes métro Belleville et arrête DE REGARDER France 5. »

J’ai donc décidé de m’habiller, mon caleçon Looney Tunes risquait de trop faire tape à l’œil. Je gardai néanmoins mes chaussettes Snoopy, faut pas déconner non plus.

« Tu ne m’as pas dit où on allait ? »

« Une soirée dans un loft à Bastille, tu connais la proprio. »

« Ah oui…mais non, je lui avais dit que je ne venais pas, et tu sais pourquoi. »

« Je lui ai dit que tu venais, moi je voulais y aller, t’es mon passeport pour la douane de l’entrée. »

« T’es pas la moitié d’un connard. »

« C’EST TOI QUI ME DIS CA ? Haha »

 

Nous sommes arrivés dans la soirée, la bouteille de champagne à la main, payée par ses soins. Un énorme salon battait aux rythmes d’une scène DB sous exta.

« Le jeudi soir, la fête est plus folle » : j’avais déjà entendu ça mardi, et lundi.

 

Après avoir salué quelques connaissances, refusé quelques lignes, j’enlaçai tendrement la propriétaire, totalement décalquée et ravie de me voir.

« TU m’as trop….(quelques pas chaloupés, un verre renversé, les genoux qui finissent au sol) manqué. »

« Toi…aussi Choupinette, toi aussi. »

Ce fut le moment propice pour commencer à s’ennuyer, les mecs avaient tous ouvert le 6e bouton de leur chemise et les filles étaient dans des états lamentables. Beaucoup trop à jeun pour faire quoi que ce soit, je pris seul la décision d’aller sur le balcon pour observer l’opéra de nuit. Wahouuu.

Et elle était là, accoudée au balcon, les yeux fixés sur un groupe de camerounais sans papier qui dansait avec une synchronisation à faire pâlir Kamel Ouali.

Elle était là, elle et tout ce qui va avec. Ses yeux bleus d’une profondeur abyssale, ses cheveux tombant sur son haut à carreaux. Sa petite jupe flashy qui mettait en valeur un galbe fantasmagorique. Et sa voix qui me donna des frissons quand elle remarqua que je la fixai sans trop de discrétion.

 

« Je vais te dire comment je m’appelle parce que je sens que tu veux le savoir.

Non je ne veux pas savoir.

Haha, et moi je peux savoir ton prénom ?

Tu veux vraiment ?

Je pense, tu crois que ça va m’apporter une précision importante ?

Tu connaîtras le prénom préféré de mes parents il y a quelques années.

Tu as raison, l’anonymat est plus palpitant. Je suppose que tu as un métier incroyable.

Tu supposes bien.

Pompier ?

Mieux.

Bibliothécaire ?

Mieux.

Arrête, ne me dis pas que…

Et si.

La chance, j’ai toujours rêvé de faire ça.

Tu m’as l’air jeune, tu peux encore.

Tu me donnes quel âge ?

Celui que j’aimerais que tu aies ?

Dis-moi quel âge j’ai ce soir alors ?

25 ans.

Banco.

 

On ne parla pas pendant peut-être une minute. Une minute qui me parut très courte. Elle me sourit, puis m’invita au plus joli rendez-vous de toute ma vie.

Je t’invite au KFC ?

 

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